En attendant que les activités pédagogiques autours de la vie du sol commencent, je vous propose de se pencher sur l’un des multiples acteurs de cette vie « minuscule » : les si utiles collemboles.
Lors de ma formation au maraîchage, j’ai adoré les cours d’agronomie. Le fonctionnement d’un sol était une découverte et j’étais impressionné par toute la biologie microscopique qui s’y trouvait. Je crois que ce qui est très frappant quand on commence à percevoir cela, ce sont les multiples interactions entre tous ces acteurs qui font que tout fonctionne. En gros, comment une feuille tombée au sol va se trouver décomposée et va libérer des nutriments utiles aux plantes à proximité.
C’est d’ailleurs comme cela que progressivement, j’ai eu envie de creuser un peu plus (c’est le cas de le dire !) et de partager ces découvertes.
Photo : Thomas Bresson
Pourquoi les collemboles ont un rôle utile et important ?
Les collemboles sont un des premiers éléments de la chaîne de la décomposition de la matière organique (feuilles, algues, excréments d’animaux…). Ce sont aussi des très gros consommateurs de champignons. Selon le professeur Jean-François Ponde du Museum d’Histoire Naturelle (https://blog.defi-ecologique.com), sans eux notre monde serait sans doute envahi par les moisissures et aucune plante n’y résisterait !
Ils consomment aussi beaucoup de bactéries, en particulier celles qui décomposent l’humus. En consommant ces bactéries les collemboles participent au relargage des nutriments qu’elles renferment au profit notamment des végétaux.
On considère qu’un m² de sol contient en moyenne 1 million d’excréments de collemboles. Ce qui joue un rôle de premier plan dans le retour des nutriments nécessaire aux végétaux.
A quoi ressemble le collembole ?
A mi-chemin entre les insectes et les crustacés, on peut imaginer que les collemboles sont de minuscules crevettes qui se sont adaptées à l’environnement terrestre il y a 400 millions d’années (question débattue). Avec trois paires de pattes, ce sont des hexapodes (arthopodes possédant six pattes) et non des insectes.
Les collemboles ont un organe en forme de bouche qui leur permet de sauter et un autre (le colloblaste) qui leur permet de se coller.
Ils sont partout sur Terre, des bords de mer aux sommets enneigés ou dans les cavernes. En forêt, sous une litière de feuilles mortes, on peut trouver jusqu’à 1 million d’individus par mètre carré. La plupart fuient la lumière (ils sont lucifuges – pour le scrabble). On en connaît environ 3000 espèces différentes.
Les conditions les plus favorables à leur développement est un environnement humide dont la température est comprise entre 10 et 30°C. Mais certains individus résistent très bien au froid, grâce à la production de protéines spécifiques.
Ils ont survécu à toutes les grandes crises écologiques que notre planète a traversé. Grâce à des fossiles, on sait qu’il y a 100 millions d’années, ils étaient quasi identiques à aujourd’hui.
Photo : Philippe Garcelon – collembole préservé dans de l’ambre (-40 M années)
Une vie de collembole
Les jeunes collemboles ne connaissent pas de stade larvaire. Ils ont déjà leur forme adulte en sortant des oeufs et croissent ensuite progressivement (comme les crustacés d’ailleurs), à travers une succession de mues. Ils sont alors très fragiles pendant cette période et peuvent représenter une proie facile pour les crapauds qui en raffolent, mais aussi des lézards, des araignées, carabes, etc
Leur cycle de vie est court (de quelques semaines à une année)et ils se reproduisent au bout de quelques semaines seulement. Et si un collembole ne meurt pas de sa belle mort, c’est peut-être parce qu’il aura croisé la route d’une araignée, d’un mille-patte ou d’une fourmie qui en aura fait son ordinaire.
Ce qui est original, c’est que les modes de reproductions sont multiples. Certaines espèces de collemboles sont capable de se reproduire par parthénogenèse (à partir seulement d’un gamète femelle sans fécondation), cela favorise leur capacité de survie (au détriment de plus de brassage génétique). D’autres espèces se reproduisent de façon sexuée. Un mâle dépose une ou plusieurs minuscules tiges, avec une petite boule à l’extrémité. Celle-ci contient les spermatozoïdes. La femelle vient alors « poser » son orifice génital dessus et stocke ensuite les spermatozoïdes.
« Bouboule »
Photo : Philippe Garcelon
Je termine cette courte présentation de cet animal incroyable par une espèce particulière de collembole : les symphypléones. Ils sont surnommés « bouboule » en raison de leur abdomen en forme d’oeuf de poule.
Ce sont des collemboles particulièrement précieux et utiles pour la qualité du sol. Ils sont de formidables dégradateurs des matières, notamment de la cellulose. Celle-ci constitue un gros tiers de la biomasse végétale et est compliquée à dégrader.
Peu sensible aux changements de températures, les symphypléones se nourrissent des restes carbonés été comme hiver. Ils ont seulement besoin d’un couvert végétal, comme par exemple un tapis de feuilles mortes. C’est à eux notamment que l’on doit de ne pas être envahi d’acariens et de nématodes (maraîchers et jardiniers leurs sont reconnaissants !)
Alors comment encourager la présence de ces si utiles collemboles dans ses cultures.
Une première chose à avoir en tête est qu’ils sont naturellement présents. Si on observe leur habitat naturel, on peut en déduire aussi que des sols couverts (feuilles mortes, paillage, mulch, etc) et conservant une humidité leur seront favorables.
Enfin, on considère que la présence nombreuse de collemboles dans un sol est un signe de sa bonne santé : absence de pollution et d’un certain nombre de pesticides. C’est certainement un encouragement à pratiquer des cultures sans polluants dans son potager .
Les collemboles ne constituent que l’un des maillons de toute cette vie des sols. Avouons qu’elle est incroyable !
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